dimanche 14 juin 2009

Les chaussettes de Perpignan bientôt lavées dans les urnes?

Les Perpignanais espèrent clore le week-end prochain la rocambolesque affaire des bulletins dans les chaussettes. Les électeurs de la cité catalane sont appelés aux urnes le 21 juin (et le 28 le cas échéant) pour refaire le match des municipales de mars 2008.
Lors de ce scrutin, le sénateur-maire (UMP) Jean-Paul Alduy, en place depuis 1993, l'avait emporté d'une courte tête (574 voix) face à la liste gauche-MODEM emmenée par Jacqueline Amiel-Donat (PS). Un résultat très vite entaché de soupçons de fraude, après que le président du bureau de vote du Haut-Vernet ait été surpris avec une douzaine de bulletins au nom du maire sortant dans... ses chaussettes.
Le préfet a cependant validé les résultats. L'opposition introduit alors un recours en annulation du scrutin devant le tribunal administratif de Montpellier. En octobre, il prononce l'annulation. Jean-Paul Alduy forme un recours devant le Conseil d'Etat, mais celui-ci est rejeté le 23 avril dernier, annulant définitivement l'élection.
La haute juridiction administrative argue du fait que l'«on ne peut déterminer l'ampleur de cette fraude mais il est difficile de juger qu'il n'y a pas eu fraude, et même fraude massive», comme le rapporte le Figaro (http://www.lefigaro.fr/politique/2009/04/09/01002-20090409ARTFIG00001-perpignan-le-conseil-d-etat-propose-l-annulation-.php?ppcseid=3917&ppcsekeyword=municipales+perpignan&mmtctg=922357909&mmtcmp=13114099&mmtmt=5&mmtgglcnt=0). Elle se base sur le nombre de votants dans le bureau litigieux (885), supérieur à l'écart entre les deux listes au second tour.
La campagne électorale a donc redémarré, dans un contexte politique agité, et marqué par la triste affaire de Saint-Cyprien.
Jean-Paul Alduy a choisi de se représenter, alors qu'une délégation spéciale de sept sages a été nommée par le préfet des Pyrénées-Orientales pour expédier les affaires courantes. Le maire déchu dénonce son invalidation: "Le Conseil d'Etat exprime un doute sur l'ampleur de la fraude et nous condamne au bénéfice du doute. Je trouve particulièrement injuste d'être condamné au bénéfice du doute", a-t-il confié à L'Express (http://www.lexpress.fr/actualite/politique/jean-paul-alduy-se-representera-aux-prochaines-municipales_758238.html).
Il met également en garde les Perpignanais contre la mise en place d'"un système Bourquin, qui tiendrait à la fois la ville et le département".
Proche de Jacqueline Amiel-Donat, Christian Bourquin est le président (PS) du conseil général des Pyrénées-Orientales depuis 1998. Tenu par la gauche depuis la Libération, le conseil général a basculé mécaniquement à droite au milieu des années 1970, lorsque les socialistes au pouvoir ont rejeté le Programme commun avec le PCF, pour fonder le PSD, future composante de l'UDF.
Le même phénomène s'est produit à la mairie de Perpignan. Paul Alduy, père du maire actuel, baron socialiste en place depuis 1959, a lui aussi rejoint le PSD.
En 1993, il a du faire face à une fronde de sa propre majorité, derrière son adjoint, le député (RPR) Claude Barate. Le conseil municipal dissout, la partielle qui a suivi a permis l'élection de Jean-Paul Alduy (UDF), jusque-là directeur de l'établissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines.
A l'époque déjà, une délégation spéciale avait pris le relais, comme le rapporte le Journal du Dimanche (http://www.lejdd.fr/cmc/politique/200917/perpignan-alduy-invalide_204072.html).
Les socialistes aimeraient donc rééditer la bascule de 1998. Cependant, ils doivent aussi composer avec certains alliés remuants, comme le président (divers gauche) du conseil régional du Languedoc-Roussillon, en rupture de ban avec le PS, et spécialiste des saillies provocatrices. La dernière en date était dirigée contre les populations harkies et gitanes de Perpignan (http://lafeuilledemanioc.20minutes-blogs.fr/archive/2009/05/24/freche-les-esclaves-votent-toujours-pour-l-esclavage1.html).
Le PS dénonce cependant de longue date un "système clientéliste, voire même féodal", de la part de l'équipe en place en direction de ces mêmes populations.
De l'autre côté de l'échiquier politique, le FN a justement longtemps fait preuve d'une belle vitalité à Perpignan.
Lors des municipales de 1989, Pierre Sergent avait obtenu 29,25 % des voix au second tour. Lors de la partielle de 1993, l'atypique Jean-Claude Martinez avait perdu son pari de proposer aux Perpignanais de l'"essayer" pendant deux ans, jusqu'aux municipales de 1995. Mais, lors de ce scrutin, Jean-Louis de Noëll avait dépassé la gauche en triangulaire au second tour, avec 36,38 % des suffrages, talonnant Jean-Paul Alduy de 3500 voix.
Particulièrement féroce en Languedoc-Roussillon, la lutte entre frontistes historiques et mégrétistes avait laissé l'extrême-droite au tapis en 2001. En mars 2008, elle s'est refait une timide santé, avec tout de même 12,29 % des bulletins, permettant au candidat FN Louis Aliot de provoquer une triangulaire.
Le 21 juin, le Front national espère un score important (http://www.nationspresse.info/?p=47111). Son résultat sur la commune aux Européennes (11,97%) peut en effet le laisser présager. Il provoquerait alors une nouvelle triangulaire peut-être cette fois fatale à Jean-Paul Alduy.
Car si l'on se réfère à ce dernier scrutin, la gauche avec les écologistes et le MODEM pèse dans les 49 %, contre environ 33 % à la droite.
Des chiffres à lire toutefois avec réserve, les équilibres locaux pouvant les modifier en profondeur.
Emmanuel SAINT-BONNET
POUR EN SAVOIR PLUS
Tout sur la géopolitique des Pyrénées-Orientales sur http://www.atlaspol.com/LARU/pyrenees-orientales.htm

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